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Un spécialiste parle "Jam Sessions" à Respire Jazz



Ancien collaborateur des journaux Jazz Hot et Jazzman, Franck Bergerot est rédacteur en chef de Jazz Magazine. Outre le texte principal de We want Miles, il a déjà publié des ouvrages sur l'artiste : Miles Davis (Le Seuil) et Le jazz dans tous ses états (Larousse). Ami du festival Respire Jazz, il y est présent chaque année et propose une conférence sur l'histoire du Jazz. Il tient également une chronique du festival sur son blog pour Jazz Magazine. Voici, ci-dessous, ses impressions sur les Jam Sessions des soirées de 2104. Elles enchantent chaque année, musiciens et festivaliers.

"Le vendredi soir:

Respire Jazz ne serait pas ce qu’il est sans sa buvette et ses jam sessions. On s’y retrouve à l’abri d’un petit préau (mais bien sûr la pluie à cessé aussitôt le piano bâché) pour la jam session emmenée par les élèves de l’Ecole de Musique de Didier Lockwood, parmi lesquels je retrouve Mathis Pascaud remarqué l’an dernier, guitariste aux idées jamais banales, toujours élégantes. On pousse John Taylor, accoudé au bar, vers le piano Fender. Il résiste, mais il ne dit pas non et, finalement, comme un vieil anglais se laisserait tenter par une partie de fléchettes, son verre de bière à la main, il s’assied au piano, s’excusant d’avoir besoin de s’asseoir un peu. Il proposera une drôle de promenade sur Les Feuilles mortes, occasion de passionnants jeux rythmiques entre lui et Pierre Perchaud. Après quoi, ce dernier prendra la basse et John Taylor cédera le clavier à Richard Poher qu’il faudra entendre aujourd’hui 28 juin à 17 au sein du quartette Elinoa avec la vocaliste Camille Durant, ainsi que demain 29 juin à 19h. Et tandis que je m’endors dans le lit de la mère supérieure de l’abbaye qui m’a été réservé, j’entends au loin la jam qui se poursuit.

Le samedi soir:

Dehors, sous le préau, à côté du bar, les tauliers de la jam session – le guitariste Mathis Pascaud, le batteur Gabriel Westphall et le contrebassiste Arthur Hennebique (ah ! le revoilà ! Quel talent !) – accueillent le public en compagnie de Thomas Enhco qui tire du Fender Rhodes de belles inventions. Puis Pierre Perchaud s’empare de la guitare pour lancer le riff des Meters qui vient sous les paroles du fameux I feel like a king, when I kiss kiss my baby !, aussitôt repris par Hennebique et décliné en connaissance de cause par Tiss Rodriguez. Olivier Bogé se met à picorer le clavier comme s’il jouait du clavinet. C’est alors au tour de Richard Poher de faire roucouler le Rhodes sur les harmonies Softly, as in the Morning Sunrise que Camille Durand entonne avec une belle assurance avant de se lancer dans un scat qui, plus qu’il m’avait semblé dans l’après-midi (peut-être parce que le jaillissement du bœuf nocturne et le challenge de la confrontation impromptue lui valent un surcroît d’énergie) rend hommage à son sens de l’articulation et de la négociation harmonique. La jam continue et je me retire terminer la nuit commencée de désobligeante manière durant le concert d’Olivier Bogé.


Le dimanche soir:

Après quoi, tout ce petit monde s’est retrouvé à la buvette pour une jam session qui s’est poursuivie tard dans la nuit, probablement l’une de plus belles qu’ait connues l’abbaye du Puypéroux, chacun y trouvant tour à tour sa place, des animateurs titulaires de la jam (le guitariste Mathis Pascaud et le batteur Gabriel Westphall) aux membres des deux trios de la soirée et ceux d’Ellinoa : Camille Durant qui s’est jetée à l’eau entre Emmanuel Bex et Francesco Bearzatti avec les honneurs, Tiss Rodriguez qui s’est gagné quelques sympathies par son sens très sûr de la polyrythmie et de la polychromie, Richard Poher qui a tenu son rang entre Emmanuel Bex et Simon Goubert (pianiste pour l’occasion), Arthur Hennebique et Nicolas Moreaux (resté sur place après le concert du quartette d’Olivier Bogé la veille) qui donnèrent deux visions distinctes et néanmoins admirables de la contrebasse. Cerise sur le gâteau, Lynn Cassiers qui s’est imposée sur les standards, notamment sur un Body and Soul ultra lent, avec une voix évoquant Rickie Lee Jones, et une intonation et un phrasé qui renvoyait plutôt à Chet Baker, des audaces de placement-déplacement presque davisiennes et un scat à la fois très sûr, tout en évitant la prouesse “instrumentaliste” au profit du sens de l’espace, du mystère, du drame. Vers 1h30, je me suis glissé dans le lit de la mère abbesse la gorge nouée et les échos de la jam sessions qui continuait bercèrent mon endormissement."

Extraits des articles de Franck Bergerot parus sur le blog de Jazz Magazine les 28, 29 et 30 Juin 2014

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